Cet article est extrait du n°11 de la revue Y, téléchargeable ici.

(c) jmph.blog_.lemonde.fr

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J’avais dix ans, c’était un bel été, le ciel était bleu blanc rouge et les enfants faisaient la queue à Décathlon pour s’acheter un maillot avec le n°10 au dos. Il y a 16 ans de ça, l’hexagone vibrait en chœur. Amateur de foot ou pas, il était quasi-impossible de passer à côté de cette vague déferlante, de cette euphorie sous fumigènes, de ces tremblements de pieds au Stade de France. Retour vers le futur, un certain 12 juillet 1998.

Je ne suis pas fan de foot, mais je me souviendrai toujours de cette soirée, des cris de joie avec mon petit frère et les amis de mes parents, de cette sortie dans la rue pour regarder toutes les voitures klaxonner. Je me suis sentie, quelques heures, mariée au reste de la France.

(c) coupfranc.fr

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L’équipe qu’on n’attendait (presque) pas

Stéphane Meunier a suivi les Bleus en 1998 et en a fait un documentaire incontournable, « Les Yeux dans les Bleus ». On y suit une bande de potes, soudée, rigolarde, humble, qui ne réalise pas le destin qu’elle est en train de porter. Au fil du temps, les matchs (bien sûr), les médias, les supporters postés à Clairefontaine, en attente d’un autographe, la pression de l’entraîneur Aimé Jacquet, les Guignols de l’info, vont leur permettre de s’investir encore plus. De trouver le juste milieu, ce soir de juillet, entre la défense assurée du quatuor de Thuram, Dessailly, Leboeuf (qui remplaçait Laurent Blanc, alors suspendu), Lizarazu (« Liza » pour les intimes), et l’attaque, de plus en plus offensive et contrôlée, de Zidane, Djorkaeff notamment, et, d’une façon assez inattendue, de Petit. Sans oublier un goal inégalable, Barthez.

Et Ronaldo s’en souvient encore.

Un Z qui veut dire Zizou

Après sa suspension pendant deux matchs avant les quarts de finale, Zinedine Zidane commence à ressentir cette popularité, cette « Zizoumania », qui fera très vite de lui une légende vivante du ballon rond. « Tout le monde dit : ‘Zizou par ci, Zizou par là’… Mais Zizou rien du tout ! (…) Il ne faut pas se prendre la tête », confie-t-il alors, révélant ce qui fait de lui une personnalité marquante, à la fois très réservée et ombrageuse.

Zidane, c’est le grand frère qu’on voulait tous avoir à la fin des années 90, la personnalité préférée des Français après un doublé mythique sur la pelouse du Stade de France. Un magicien.

(c) dailyfootballclub.fr

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Sur les pavés, la joie

Le 12 juillet 1998 a un parfum d’Hermes House Band, un « lalalalala… » qui résonne dans les rues, les vestiaires, les radios. Il est suivi, très vite, d’un célèbre « Et 1, et 2, et 3 – 0 ! » lorsque Petit marque. La France explose. Tous se pressent sur les Champs-Elysées, la voix de Freddy Mercury est sur toutes les lèvres, « We are the champions »… Nous sommes des millions, blacks, blancs, beurs, femmes, hommes, vieux, jeunes, à l’unisson, image – éphémère – d’une nation unie dans la joie.

C’est ce que je retiens lorsque j’y repense : oui, le match était excellent, le Brésil, nation ès football, est tombé des nues devant les Bleus. Mais on ne parle pas de n’importe quel match : on parle de ce que le sport offre de meilleur à la société : la solidarité, l’envie, le partage, la gagne. Et une étoile dorée sur le maillot. La preuve, deux ans plus tard, des effets positifs d’une victoire de Coupe du Monde : une autre, tout aussi inoubliable, lors du championnat d’Europe.

Il y a deux jours, en prenant le bus, je me suis approchée du chauffeur qui écoutait la radio, reconnaissant un accent familier. L’entraîneur de l’équipe de France version 2014, Didier Deschamps, se montrait pessimiste (« réaliste », disait-il) quant à une victoire cette année. Comme si, un jour en 1998, la France s’était arrêtée, et avait fait un rêve éveillé, quelque chose qui était voué à ne se produire qu’une seule fois : « Et maintenant, on peut mourir tranquille… ».

La suite, au Brésil… cette fois, le 13 juillet 2014 ?

Pour découvrir notre sondage sur le mondial 98… et celui de 2014, rendez-vous là !

Written by Claire Faugeroux

"Y" dans l'âme, fermement décidée à prouver que sa génération a construit sa propre culture, nez collé aux écrans... ou pas !