Lorsqu’on a entre 20 et 35 ans, il n’est pas rare de compter davantage de couples pacsés que mariés dans son entourage. Et les réactions sont parfois très contradictoires : certains organisent des cérémonies et considèrent le Pacte Civil de Solidarité comme une liberté, une alternative, une officialisation non-religieuse du couple. D’autres le font simplement pour acheter une maison, ou en attendant de se marier. Autant d’avis différents qui m’ont poussé à écrire cet article aujourd’hui.

Le Pacs a 15 ans : que signifie-t-il aujourd’hui ? Je me suis posé la question, et j’ai aussi interrogé des lecteurs d’Y.

(c) Bertrand Sennegon/Flickr/Creative Commons.

(c) Bertrand Sennegon/Flickr/Creative Commons.

De 1999 à 2015 : l’évolution des mentalités et du Pacs

Premier constat : à 72%, les interrogés considèrent qu’il s’agit d’abord d’un moyen de payer moins d’impôts, d’acheter un logement, bref, de faciliter bon nombre de démarches ; à 39% qu’il officialise l’union entre deux êtres ; à 33% qu’il symbolise l’acceptation des couples homosexuels dans notre société. Autant dire qu’en 15 ans, le regard porté sur le Pacs a opéré une véritable mutation.

Les défenseurs du Pacs ont dû se battre pendant une dizaine d’années pour le faire adopter, puisque Jean-Luc Mélenchon proposait déjà, en 1990, une première proposition de loi en ce sens. Après une série de débats publics et politiques, le Pacs est créé en novembre 1999 pour permettre aux amoureux de même sexe d’être reconnus, faire évoluer les mentalités vis-à-vis de l’homosexualité, et aussi servir d’intermédiaire entre le concubinage et le mariage.

Aujourd’hui, le Pacs connaît davantage de succès chez les couples hétérosexuels. En 1999, 42% des pacsés étaient homosexuels : ils représentaient 7% des pacsés en 2006. Le Pacs, plus qu’une alternative, devient au fil des années un rival outsider face à l’institution du mariage : on compte désormais 3 Pacs pour 4 mariages civils.

Pour la génération Y, une alternative

Le Pacs séduit davantage les couples jeunes, comme l’explique Claire Decondé, qui a réalisé une étude sur le sujet pour l’INSEE :

« Parmi les Franciliens de 25 à 34 ans en couple, le statut majoritaire est le mariage (45 %) tout juste devant l’union libre (43 %) et enfin le Pacs (12 %). Cependant, dans la région comme en province, cette génération, qui était adolescente ou tout jeune adulte lors de l’adoption du Pacs en 1999, est celle qui s’est le plus appropriée le Pacs. Les personnes entre 25 et 34 ans représentent la moitié des personnes Pacsées alors qu’elles ne représentent que 20 % de l’ensemble des personnes en couple. »

Source : Mariage, union libre ou Pacs : à chaque âge sa forme de couple, Claire Decondé, publié dans « Ile-de-France : faits et chiffres » n°302, février 2013.

En effet, parmi les personnes interrogées par Y, 44% ont entre 26 et 35 ans et 33% entre 21 et 25 ans. On peut ajouter qu’en plus de « l’appropriation » du Pacs par cette tranche d’âge, on parle là d’une génération qui a vu ses parents divorcer, et a réagi par une métamorphose de la notion de « couple » : liberté de s’engager (ou non), d’adopter un mec (ou non), de tomber amoureux de qui on veut, parce que comme disaient les Backstreet Boys : « I don’t care who you are / Where you’re from / What you did / As long as you love me »…

Bùi Linh Ngân

Un « pré-mariage » ? (c) Bùi Linh Ngân/Flickr/Creative Commons.

raisonsUn grand A comme… Administratif ?

Pour quelles raisons avez-vous choisi le Pacs ? C’est ce que j’ai demandé aux lecteurs, dont un tiers est justement pacsé. Les avis sont divisés et multiples : à pourcentage égal, ceux-ci m’ont répondu que c’était à la fois « pour des raisons juridiques et fiscales » et « par amour ».

 « J’envisage de me pacser pour payer moins d’impôts et officialiser une relation autrement que par le mariage »

Il est vrai que les droits et devoirs du Pacs se rapprochent de plus en plus (dans les textes) de ceux du mariage, puisque qu’il implique assistance mutuelle (pas seulement financière, mais morale !), aide matérielle et vie commune, mais aussi liberté de mettre un terme au contrat. Les partenaires peuvent choisir entre la séparation des biens ou au contraire, de devenir propriétaires d’un même bien, et l’union est inscrite depuis 2006 et 2007 sur l’état civil et l’extrait de naissance de chacun des conjoints. Il est aussi une version « simplifiée » de l’union civile, puisqu’on peut le contracter, selon le lieu d’habitation, soit au tribunal d’instance, soit directement chez le notaire. Il peut être modifié à tout moment, et rompu par « simple » déclaration. Il est aussi plus souple que le mariage pour ce qui est de la succession.

 « Pour moi le Pacs, c’est juste un papier facile à faire, beaucoup plus difficile (et coûteux) à défaire, c’est comme le mariage, quand ça se passe pas à l’amiable, ça coûte cher. Tout impact émotionnel mis de coté. »

Ce qui pêche pour la plupart des interrogés, c’est le côté romantique du contrat (sauf si votre notaire s’appelle Hugh Grant, évidemment). Pour pallier ce cruel manque de glamour, certaines mairies ont donc décidé d’organiser des cérémonies. Reste aussi la laïcité de la procédure, qui séduira moins les personnes croyantes.

 « Le Pacs comme le mariage civil sont prononcé à la vitesse de l’éclair… l’amour pourra t’il survivre aux orages sans une spiritualité qui renforce l’alchimie entre deux êtres ? »

« Je n’y pense pas encore, mais si l’occasion se présente je privilégierai plutôt le Pacs que le mariage (trop traditionnel et associé à la religion). »

Un « pré-mariage » ?

valeurLe Pacs fait donc souvent office de « pré-mariage », puisque de nombreux couples pacsés envisagent ensuite de se marier, comme 61% de nos interrogés. 56% d’entre eux considèrent d’ailleurs qu’il a « moins de valeur » que le mariage, contre 39% qui estiment qu’il en a « autant ». Un peu comme ces couples qui achètent une tortue ou un lapin pour avoir un « pré-bébé ».

« Nous nous sommes pacsés pour « officialiser » notre relation en attendant de nous marier. Mais le Pacs reste à mes yeux et celui de mon compagnon moins symbolique et moins « puissant ». La valeur n’est pas la même que celle accordée au mariage, le Pacs est plutôt une officialisation qu’un serment : le mariage garde un caractère sacré qui lui est propre. Il y a autour du mariage un mythe une effervescence que le Pacs ne produit pas. »

Certes, avec le Pacs, vous dites adieu à la robe blanche, l’enterrement de vie de jeune fille/garçon, la cérémonie, la meilleure amie qui pleure parce qu’elle n’a pas réussi à choper le bouquet (ou le témoin), la chenille qui redémarre, c’est vrai.  Et le contrat de mariage est aussi plus détaillé, encadré et « protecteur » des droits et devoirs de chacun.

Il n’en est pas moins symbolique pour autant, puisqu’avant le mariage pour tous, il était en France le point d’orgue de la lutte pour l’acceptation des couples de même sexe.

Finalement, peut-être faudrait-il choisir de donner le sens que l’on souhaite au Pacs… A tous mes amis pacsés : pourquoi se dispenser d’une cérémonie où vous êtes l’attraction principale de la journée et recevez des tas de cadeaux ? 😉

Written by Claire Faugeroux

"Y" dans l'âme, fermement décidée à prouver que sa génération a construit sa propre culture, nez collé aux écrans... ou pas !