Cet article est extrait du n°8 de la revue Y, téléchargeable ici.

Photographie : ©Mrolivierl

Photographie : ©Mrolivierl

Eh oui, même si on dit tous « c’était mieux avant », même si on aurait tous préféré naître à l’époque de nos parents (ou de nos grands-parents, pour les plus excentriques d’entre vous, chers lecteurs), même si on persiste à s’acheter des vinyles et des platines qui coûtent nos salaires de stagiaires, il faut se l’avouer : on profite bien de notre époque quand même !

Parce que, oui, papa et maman ils étaient cools quand ils étaient jeunes, hippies, mods ou punk en fonction des cas ; mais eux, ils avaient seulement quelques 33 ou 45 tours, et ils devaient les écouter en boucle, à moins de dépenser tout leur argent de poche (qu’ils préféraient mettre dans l’essence de leur mobylette, évidemment).

Mais quelle chance nous avons, nous, la petite génération Y, d’être des enfants des années 2000. Non, je ne plaisante pas ! Nous, au moins, on peut écouter toute la musique qu’on veut, mettre 160 gigas de tout et de rien dans nos iPod, regarder sur YouTube les nouveaux clips des stars les plus débiles et découvrir les lives auxquels on n’a pas pu assister (car on préfère mettre tout notre argent de poche dans les bars et les pu… euh fringues, pardon).

Eh oui, grâce au développement du numérique, les plateformes d’écoute et de téléchargement, légales ou illégales, se multiplient, rendant l’accès à la musique plus facile et moins cher, voire gratuit.

Comment accéder à la musique sur Internet ?

Les solutions payantes pour télécharger de la musique, on les connaît toutes, ou presque : ce sont les plateformes telles que iTunes, Virgin Mega ou bien le plus sophistiqué Qobuz. Mais il existe aussi des solutions gratuites et pas forcément illégales, loin de là !

Par exemple Jamendo permet de télécharger de la musique « Creative Commons », c’est-à-dire libre de droit. Évidemment, vous n’y trouverez pas les artistes les plus célèbres, ni ceux qui ont signé chez les majors…

Mieux, le réseau social Bandcamp permet aux artistes de se créer une page et d’y mettre leur musique en écoute. Ils peuvent surtout y proposer des téléchargements, gratuits ou payants (soit avec un prix fixe, soit avec le système de « pay what you want »). Contrairement à ce que vous pouvez penser, plein de groupes tentent l’expérience de la gratuité, donc allez y jeter un œil !

Les solutions pour écouter (et non télécharger) de la musique gratuitement sont plus nombreuses (normal !), plus connues, et plus utilisées. Deezer, Spotify, Soundcloud et les autres ont différents modes de fonctionnement, mais permettent, en gros, d’écouter sans payer, hormis pour ceux qui veulent s’affranchir des limitations de temps et (surtout) des publicités entre les morceaux. Sinon, il y a aussi les versions vidéo YouTube et Dailymotion, mais il faut être patient : les pubs sont fréquentes, et surtout il faut prendre le temps de chercher les titres, créer une playlist, etc.

Et les artistes, qu’en pensent-ils ?

La musique étant un art immatériel, Internet a développé l’idée d’un retour à un mode d’exploitation où le commerce de supports physiques, en l’occurrence de CD, serait secondaire.

Du coup, les maisons de disque, leur lobby, l’État et certains artistes se mobilisent depuis des années pour le maintien de la « musique payante », même si elle est numérique. Mais aucune législation efficace et adaptée n’a encore été trouvée (sorry Hadopi) : il n’y a pas de solution miracle dans ce domaine, et encore moins une pensée universelle.

Si certains artistes sont contre le téléchargement gratuit (ce qui se comprend), d’autres laissent faire, et les meilleurs voient le digital comme une opportunité, ou ont au moins compris qu’ils doivent faire avec. Ils s’attachent donc à développer des stratégies adaptées.

L’agence Don’t believe the Hype, fondée par Virginie Berger, est spécialisée dans ces stratégies musicales, essentielles à découvrir pour les artistes, mais aussi très intéressantes pour les simples consommateurs de musique comme nous !

Parmi ces nouvelles méthodes de communication et de marketing utilisées par les artistes, le « direct-to-fan » est sûrement la plus développée. Comme son nom l’indique, elle consiste à supprimer les intermédiaires entre les artistes et leurs fans, notamment en passant par des prises de paroles et des échanges directs via Facebook et Twitter, renforçant ainsi les liens avec les fans.

©Audesou

Photographie : © Audesou.

Il est également possible pour les artistes de mettre certains de leurs titres uniquement sur Internet ou en écoute en avant première, comme l’a fait Julien Doré en faisant découvrir LØve, son nouvel album, en exclusivité sur Spotify, avant sa sortie en CD.

En puis pour un artiste, surtout pour ceux qui débutent ou ont un public encore restreint, la musique en ligne permet pas mal d’avantages significatifs : baisse des coûts de production et de distribution, réduction des délais et des risques, etc. Et ouais ! Tout cela permet des économies d’argent mais aussi de temps. Ces ressources peuvent alors être consacrées à la pure création artistique… ou aux stratégies digitales !

Les avantages pour les consommateurs ?

La musique sur Internet (en écoute et/ou téléchargement gratuit) permet de faire un nombre incalculable de découvertes, sans que les consommateurs aient à « s’engager » (comprendre « payer »). On hésite donc beaucoup moins à écouter de nouveaux genres musicaux, artistes et morceaux.

L’étude « Baromusic », menée par Havas Sports & Entertainment confirme cette tendance : aujourd’hui, 61% des Français écoutent au moins 10 genres de musique différents. Cette même étude classe les Français en 5 groupes de consommateurs : Les « mute », les « nostalgiques », les « groupies », les « tontons rockeurs », et surtout les « full shuffle ». Ceux-là, c’est nous, petits jeunes de la génération Y ! On écoute de tout et de rien, souvent en mode aléatoire et sans même connaître les artistes. On a laissé tomber les CD pour les plateformes en ligne, on écoute ce que nos amis partagent sur Facebook et Twitter, on est boulimiques de sons, de nouveautés et de plaisir. En gros, le digital a bel et bien donné naissance à de nouvelles formes de consommation musicale.

L’autre avantage de la musique en ligne, c’est qu’elle n’a (presque) aucune limite : sur Internet il est possible de retrouver des lives qui ne sont jamais sortis officiellement, d’écouter des milliers de morceaux enregistrés devant des webcams, de découvrir des artistes dont les noms sont inconnus dans les rayons des Fnac et autres. Bref, Internet est une véritable mine d’or pour les mélomanes.

Photographie : © ToGa Wanderings.

Photographie : © ToGa Wanderings.

Les dépenses « musicales » existent encore, et ne sont pas prêtes de s’arrêter !

Le problème, c’est que ces nouveaux modes de consommation de contenus culturels sur Internet donnent des habitudes de gratuité aux consommateurs, qui sont alors plus sceptiques quant au fait de payer pour se procurer un contenu similaire.

Malgré tout, le support physique reste un objet important pour certains d’entre nous. Tout comme pour les tablettes numériques et les livres, il restera toujours des adeptes des CD, qui veulent avoir l’objet dans leurs mains, contempler l’artwork et le livret. Le support physique confère à la musique une valeur ajoutée certaine, et surtout un plaisir incomparable.

Et puis le grand retour du vinyle fait mentir les chiffres du marché de la musique enregistrée. En octobre, une quinzaine de disquaires ont investi l’ancien Virgin Megastore (maintenant abandonné) de Barbès, à Paris, pour y ouvrir une boutique éphémère. Dans la même lignée, le Disquaire Day, organisé en faveur des disquaires indépendants connaît chaque année, depuis sa création en 2007, un succès grandissant. D’ailleurs, sa date pour 2014 est déjà fixée : ce sera le 19 avril.

Enfin, les dépenses « musicales » ne se font plus uniquement dans l’achat de musique enregistrée : le merchandising (objets et vêtements dérivés) et surtout les concerts et festivals sont de plus en plus prisés des Français, qui n’hésitent plus (trop) à aller voir des performances en live, après avoir été convaincus par la musique découverte sur Internet, gratuitement.

D’ailleurs, une étude initiée en juin dernier par Nielsen et CGA Strategy (en collaboration avec Digitick et Halloween Agency) démontre qu’avant l’été, un Français sur deux prévoyait d’assister à au moins un festival au cours de l’année. En plus, ces festivaliers sont majoritairement constitués de jeunes aux ressources limitées, ultra-connectés et influents. Eh oui !

L’avenir des supports de musique enregistrée suscite donc des débats, qui ont bien lieu d’être : la musique gratuite sur Internet ne nuit pas forcément aux artistes ! Selon certains, le marché des disques ne donne pas de signe d’une disparition rapide. Par exemple, pour David Vandiedonck, chercheur en sciences humaines, s’il est certain que les « majors » qui produisent de la musique de divertissement connaissent des difficultés, d’autres segments sont florissants, en particulier les « petits éditeurs musicaux ». La crise du disque varierait donc en fonction de son contenu, et surtout de son public. À méditer !

 

Playlist

Pour finir, voici 10 titres, variés et plus ou moins connus, que j’ai découverts sur Internet en me comportant en « full shuffle » digne de ce nom. Enjoy !

Awkward – Fidlar

Insane – Griefjoy

Faraway Land – J.C. Satàn

Love is Lost – David Bowie

Lover’s Cave – Is Tropical

Loose Sutures – Fuzz

Our Lights – BRNS

Tales of a Rocking Boat – Louis Aguilar

Violet – We Are Match

Yallah – Petit Fantôme

Written by Paola Vavasseur

Rédac Chef, amoureuse (de culture, communication et voyages) et passionnée (par les choses innovantes, intelligentes & rigolotes) !