Cet article est extrait du n°11 de la revue Y, téléchargeable ici.

Dans la musique, les créations originales semblent être la base, la condition sine qua non  pour obtenir de la reconnaissance… et le succès. Pourtant, les reprises sont très présentes, et pas que pour les standards du jazz, surtout en ce moment.

Les reprises, c’est un peu comme certaines arnaques. Elles sont souvent de jolis tours de passe-passe, qui permettent de gagner beaucoup (de notoriété, de mérite ou d’argent), de façon adroite et originale. Mais certaines arnaques sont tout simplement moches et injustes… tout comme certaines reprises !

Aujourd’hui, grâce à Internet et surtout aux très nombreux artistes, amateurs ou professionnels, qui y postent des vidéos, on découvre de plus en plus de reprises. Quand on clique sur un lecteur pour en écouter une, le suspense est toujours à son comble : qu’est-ce que ça va donner ? Est-ce que cette chanson horrible va enfin être écoutable, grâce à cette reprise ? Ne va-t-on pas être déçu, car on adore la chanson originale ?

Comment reconnaît-on une bonne reprise d’une mauvaise ? En l’écoutant ! Et oui, il n’y a pas de recette magique, ni même de critères prédéfinis, et il s’agit d’après moi, très souvent, d’une question de goût.

À l’écoute, notre réaction est toujours différente, on trouve tous une remarque à faire : ça ressemble trop à l’originale, ou bien la chanson est méconnaissable, différente, très bonne ou trop mauvaise.

En musique comme ailleurs, les classements sont fréquents. Parmi tous ceux qui existent, le magazine Rolling Stones a dévoilé, il y a quelques années déjà, la liste des chansons les plus reprises de tous les temps. En tête du palmarès ? Paul McCartney, avec son mythique Yesterday. Plutôt que d’étaler les résultats de ce classement (dont j’aimerais bien d’ailleurs connaître les méthodes de réalisation et de recherche), tentons plutôt d’établir une sorte de typologie des reprises, permettant je l’espère de parler du plus grand nombre.

Les groupes de reprises

Parler des reprises sans évoquer les groupes qui en ont fait leur spécialité serait presque un sacrilège. Non, ici je ne souhaite pas traiter principalement des groupes de bal, de mariages et de fêtes de villages (n’y voyez aucune offense, hein), mais plutôt de ceux qui se consacrent à un seul groupe. Ainsi, par exemple, le groupe Lez Zeppelin, exclusivement féminin, reprend avec brio les célèbres tubes des rockeurs à l’origine de nombreux morceaux planétaires. Parmi les « cover bands » célèbres, on peut aussi citer, et écouter, les Rabeats, qui reprennent les Beatles sans pour autant se contenter de les imiter, ou encore The Australian Pink Floyd Show, « tribute band » mettant les Pink Floyd à l’honneur. Ces nombreux groupes attirent les foules, car ils permettent de faire revivre des chansons et groupes aujourd’hui disparus.

Les « traductions »

Une très grande partie des reprises sont tout simplement des traductions de chansons préexistantes. Ce phénomène a d’ailleurs bien aidé certains artistes francophones, tels que notre cher Johnny national. Nous le savons, le Pénitencier n’est autre qu’une adaptation de The House of The Rising Sun, chanson folk américaine dont la version la plus connue est celle du groupe The Animals. Hugues Aufray a également donné un bel exemple en sortant un album entier composé d’adaptations françaises de Bob Dylan.

Mais ne nous inquiétons pas, les traductions se font aussi dans l’autre sens ! Eh oui, la célèbre My Way de Paul Anka (qui figure d’ailleurs dans le classement Rolling Stones des chansons les plus reprises évoqué plus haut) est inspirée de Comme d’habitude de Claude François, et non l’inverse ! De même, récemment, le groupe hollandais Cut a buzzé sur Internet avec sa reprise de Papaoutai de Stromae.

Les commerciales

Oui… et oui… Les raisons d’une reprise sont souvent plus ou moins sombres… et rapportent gros ! On va passer vite sur cette catégorie, qui ne m’enchante guère. Honnêtement, faire des albums en hommage à Jean-Jacques Goldman, alors qu’il est encore bien vivant, en reprenant de manière plus ou moins vulgaire ses tubes, c’est être vraiment honnête avec le public ? Si vous voulez écoutez du Goldman, écoutez du vrai Goldman, s’il vous plaît.

(c) DR.

(c) DR.

Les transformations stylistiques

Reprendre une chanson connue, voire ringarde, dans un autre style, c’est le pari que se fixent de nombreux musiciens et chanteurs, à l’instar de Julien Doré, qui, alors qu’il était candidat du télé-crochet Nouvelle Star en 2007 s’est risqué à tenter un Moi Lolita viril et sulfureux en direct à la télé.

Bien avant, d’autres artistes moins connus, moins relayés par les médias en tout cas, avaient déjà eu cette magnifique idée. C’est par exemple le cas du génialissime Richard Cheese, qui, accompagné par le Lounge Against the Machine (la belle référence !), reprend des dizaines de chansons en version jazz / swing, assez cheesy et non sans humour.

Dernier exemple, car il y en a des centaines : qui n’a jamais écouté une punk rock cover dans son adolescence ?  Honnêtement, retentez l’expérience, ça met toujours de bonne humeur !

Les samples et remix

Moins considérés comme des reprises, les samples en forment pourtant l’une des catégories, et sont très fréquents actuellement.  Ils consistent à reprendre un air connu (ou un peu moins) et souvent entêtant, pour s’en servir de trame de fond. Cette pratique est devenue une (belle) habitude, dans la musique électro et hip-hop notamment. Parmi les samples emblématiques, on peut citer Harder Better Faster Stronger  des Daft Punk, née en 2001 et reprise en 2007 par Kanye West dans son titre Stronger . Il me semble nécessaire d’évoquer ici un autre exemple, car je crois que (malheureusement) peu de personnes s’en sont aperçues : MIA n’a pas inventé la super mélodie de son tube Paper Planes… elle l’a empruntée au Clash.

Les reprises… cachées : ou plagiat

Enfin, mentionner le plagiat n’est pas inutile. Faire des reprises ou sampler des chansons, ok. Le faire sans l’avouer : hors de question.

L’année dernière, les « directioners » en ont pris pour leur grade. Comment les One Direction ont-ils fait pour se dire que personne ne reconnaitrait la mélodie de Baba O Riley des Who (sortie pour rappel en 1971), dans leur titre sobrement intitulé Best Song Ever ? Fair-play, les Who n’ont pas intenté de procès aux cinq choucroutes britanniques, le guitariste ayant même déclaré « J’aime leur single et j’aime One Direction » (really ?). En revanche, les fans du jeune groupe nous ont bien fait sourire avec leurs tweets et remarques (presque) assassines et fortement ignorantes, telles que « The Who attaquent les 1D pour plagiat parce qu’ils veulent se faire connaître » ou encore la menace ultime « s’ils suppriment cette musique, The Who vont rien comprendre à leur vie c’est moi qui vous le dis ! » (on vous épargne les fautes d’orthographe).

Bref, toutes les reprises dont on vient de parler ont un point commun : elles permettent de découvrir ou de redécouvrir certaines chansons oubliées ou qui ne sont pas parvenues jusqu’à nos oreilles. Parmi celles-ci, les magnifiques reprises de Jolene par les White Stripes ou encore Miley Cyrus (oui, oui, je vous promets…) m’ont permis de découvrir la chanson originale de Dolly Parton, prêtresse américaine de la country.

Bonnes ou mauvaises, les reprises sont bien souvent des surprises, qui font revivre des chansons parfois passées inaperçues, parce qu’elles ne correspondaient pas à la mode musicale d’une époque donnée.

Grâce à Internet, les covers sortent du cadre des concerts (oui, les reprises se font souvent en live, quand les artistes se font plaisir sur scène et offrent un moment exclusif au public), et se font toujours plus présentes !

 

Playlist :

  • Beat It – Richard Cheese (originale : Michael Jackson)
  • Fever – The Cramps (originale : Little Willie John)
  • Gloria – Patti Smith (originale : Them – Van Morrison)
  • Happy – Woodkid (originale : Pharell Williams)
  • Highs and Low – Kid Cudy (originale : Bob Dylan)
  • Jolene – Miley Cyrus (originale : Dolly Parton)
  • Les Champs Elysées – NoFX (originale : Joe Dassin)
  • My Way – Sid Vicious (originale : Paul Anka)
  • Paper Planes – MIA (originale : The Clash)
  • The Girl From Ipanema – Amy Winehouse (originale : Pery Ribeiro)

Written by Paola Vavasseur

Rédac Chef, amoureuse (de culture, communication et voyages) et passionnée (par les choses innovantes, intelligentes & rigolotes) !