Cet article est extrait du n°12 de la revue Y, téléchargeable ici.

Source : Tumblr/1D Touch.

Source : Tumblr/1D Touch.

La nourriture ou les vêtements produits équitablement et/ou localement sont de plus en plus demandés par certaines catégories sociales. On veut du café équitable, des vêtements « sweatshop free »… Mais cette tendance peine à s’affirmer dans le milieu de la culture. Avec une quantité énorme de contenu gratuit (ou presque) disponible à tout moment, rétribuer les créateurs n’est plus une priorité pour les utilisateurs. Le téléchargement et le streaming gratuits ont grandement nui aux artistes, qui ne touchent plus que d’infimes rémunérations pour leur travail. Saviez-vous qu’un artiste ne gagne que quelques centièmes de centime d’euro par écoute sur des sites de streaming populaires ? Pour vous faire une idée : mille écoutes d’un album complet rapportent seulement 30 euros. Impossible d’en vivre, à moins d’être une icône pop…

Source : Tumblr/1D Touch.

Source : Tumblr/1D Touch.

La préoccupation première des grandes industries du divertissement est le profit, elles misent donc sur du contenu à fort potentiel commercial, sans encourager la diversité et la créativité ou protéger les artistes. Il est par exemple intéressant de savoir que le monde de la musique est régi par trois grands labels et qu’Universal détenait 44% du paysage musical français en 2011[1]. C’est en voulant se protéger des oligarques de la musique que sept labels français indépendants se sont regroupés en 2004 pour créer CD1D, une fédération de petits producteurs dédiée à la distribution alternative et équitable de musique. Aujourd’hui, la fédération compte plus de 250 labels indépendants originaires de France, mais aussi du Québec, de Suisse, Belgique, Angleterre, et plus de 2000 artistes : une formidable diversité de genres, de groupes et de découvertes. Pour faciliter l’accès aux créations des artistes, CD1D a créé la plateforme de streaming 1D Touch[2]. Aucune référence au groupe anglais One Direction ici, cette plateforme est pensée pour « expérimenter un nouveau modèle économique alternatif et équitable » selon ses créateurs. Les utilisateurs peuvent souscrire un compte grâce aux partenaires : bibliothèques municipales, programmes spéciaux des régions[3]…

Ce nouvel outil est pensé pour diffuser la musique autrement qu’à travers le circuit traditionnel, mais aussi pour interagir avec ses acteurs. Son fonctionnement démocratique veut être préservé par son développement, pour permettre aux artistes, labels, créateurs et utilisateurs de participer au développement de la plateforme, avec des collèges d’utilisateurs. C’est un outil inédit dans le paysage musical français et européen, qui pourra peut-être encourager plus de labels ou d’artistes à se regrouper pour contrer le modèle imposé par les grandes multinationales. Bien qu’il semble difficile d’envisager que ce système devienne dominant, c’est une alternative probante pour les petits acteurs du milieu de la musique. Mais pour qu’elle puisse se développer, ce sont les utilisateurs qui devront s’investir pour la faire connaître et responsabiliser leur consommation de musique et autres produits culturels.

[1] Les Echos, « En France, Universal Music contrôle près de la moitié du marché musical » 07/02/2012

[2] www.1dtouch.com

[3] La région Rhône-Alpes propose un partenariat à travers la carte M’ra, un programme d’avantages pour les jeunes scolarisés dans la région.

Written by LA REVUE Y