Le film de Desplechin acclamé à Cannes est beau mais un peu trop bavard. Présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, Trois souvenirs de ma jeunesse a tellement emballé les critiques que beaucoup ont regretté qu’il ne soit pas en compétition officielle. Après l’avoir vu, on peut aisément comprendre l’enthousiasme des critiques car le neuvième long métrage d’Arnaud Desplechin est élégant et loin de manquer d’intérêt et de charme bien que souffrant de quelques longueurs.

Paul Dédalus, interprété par Mathieu Almaric, revient en France après plusieurs années passé au Tadjikistan. Ce brillant anthropologue quadragénaire s’apprête à embrasser une carrière de conseiller auprès du ministre des affaires étrangères. Mais un problème de passeport va l’amener à se remémorer et à raconter son passé, son voyage à Minsk durant la guerre froide, ses souvenirs d’enfance à Roubaix et surtout son grand amour pour la sublime mais complexe Esther (Lou Roy-Lecollinet).  Il y a quelque chose de doux et de douloureux à la fois dans ce film. Durs évidemment sont les morts et les drames qui resurgissent du passé mais même les souvenirs heureux de l’adolescence de Paul se teintent de gravité. Se souvenir c’est en effet toujours faire resurgir artificiellement un monde englouti à jamais.

Esther  ( Lou Roy-Lecollinet) , l'amour fou de Paul

Esther ( Lou Roy-Lecollinet) , l’amour fou de Paul

Mais il y a également beaucoup de douceur et de tendresse. Desplechin filme de façon émouvante l’enfance puis l’adolescence de son héros et de sa bande d’amis. Dans la vie de Paul Dédalus, les femmes ont une importance capitale. La mère folle et malheureuse, la grande tante aimante. Le professeur Béhanzin et bien évidemment Esther sont les personnages qui ont le plus d’impact sur la destinée de Paul. Ce sont de beaux personnages de femmes. Il y a beaucoup de romanesque dans Trois souvenirs de ma jeunesse. Le voyage à Minsk est digne d’un roman d’espionnage, l’enfance du héros est baignée dans une atmosphère quasi fantastique et l’histoire d’amour n’est pas tiède, très romantique voire exaltée, c’est une passion qui se veut digne des grand romans et des mythologies.

C’est peut-être un peu la limite du film. En effet, les longs échanges épistolaires entre Paul étudiant à Paris (Quentin Dolmaire) et Esther restée à Roubaix finissent par fatiguer. Si le début de leur amour était très touchant, on peut finir par être un peu agacés par leurs marivaudages. C’est dommage car sans autant de bavardages un peu intellos, le film aurait pu être encore plus fort et universel.

Written by Matthias Hardoy

Parle beaucoup de cinéma et un peu d'autres choses (radio, théâtre...) Franco- espagnol de nationalité, finnois de cœur et parisien depuis peu...