Le cinquième long-métrage de Samuel Benchetrit, actuellement au cinéma, nous plonge dans une banlieue triste où des âmes esseulées vont apprendre à s’aimer.
Un immeuble délabré, vieillot, abandonné. Voilà le décor peu reluisant du film. Comme dans Mommy de Xavier Dolan, le cadre est carré pour mieux évoquer l’enfermement des personnages dans un quotidien morne. Durant tout le film, le réalisateur accorde également de l’importance aux objets (ascenseur, vélo d’appartement, lavabo…) qui, comme chez Tati ou Chaplin, interfèrent avec la réalité des personnages et les déstabilisent. C’est ce combat tragique (et perdu d’avance ?) qui, dans toute son ironie, nous arrache un sourire…
Des rencontres folles, improbables et mystérieuses, vont pourtant sauver les personnages du spleen. Un célibataire endurci va séduire une infirmière en se faisant passer pour un photographe, une ancienne gloire du cinéma et un adolescent vont s’épauler, une vieille algérienne et un astronaute américain vont cohabiter.
C’est poignant de voir des êtres solitaires se laisser gagner par la tendresse. À partir du moment où on fait vraiment attention à l’autre, pas besoin de parler la même langue, d’avoir le même âge, on finit par se comprendre parfaitement, bien au-delà des mots. Madame Hamida et John le démontrent très bien dans une séquence de repas pleine de grâce.
Certains critiques éminents pointeront sans doute le vide politique de cette œuvre. Ils oublieront alors un peu vite que les personnages s’étreignent à la fin car la réalité est crépusculaire. On n’est pas si loin de Tchekhov et du final de sa pièce Les Trois sœurs quand Olga, Irina et Macha s’enlacent pour vaincre la peur face à un monde qui s’effondre.
On pense également à Pierre Salvadori et à son film Dans la cour, comédie dramatique où brillait déjà Gustave Kervern. Si Benchetrit avait mieux relié les trois histoires qui le composent, Asphalte aurait sans doute été un film encore plus beau que l’œuvre de Salvadori.
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.