Je n’ai jamais eu l’occasion de lire un ouvrage comme celui-ci. « Les gens dans l’enveloppe » d’Isabelle Monnin, est un bijou hybride, boudé (pour le moment) des grands Prix, universel et intemporel, empreint de nostalgie.

Les_gens_dans_l_enveloppeTout commence par une enveloppe de photographies que l’auteure achète en 2012 sur un site d’enchères en ligne. 250 photographies de famille, intimes et banales.

Comme aimantée par ces gens dont elle ne sait rien, Isabelle Monnin décide alors d’inventer leurs vies et de leur consacrer un roman à plusieurs voix – des voix majoritairement féminines, dans une écriture poétique, parfois déstabilisante, mais qui parvient à nous plonger dans une atmosphère particulière, entre passé et présent. A notre tour, on a l’impression de connaître « les Gens » comme elle les appelle : la petite Laurence, héroïne de la couverture du livre ; sa mère, « l’absente » Michelle (« peut-être la photographe ? », pense l’auteure), et sa grand-mère aux lunettes noires, Simone. Trois histoires de solitaires, de solitudes, entremêlées avec celles des hommes, au fil des générations. Notamment Serge, le père, compagnon de son coeur brisé.

Sa double casquette de journaliste et d’écrivaine pousse alors Isabelle Monnin à partir sur les traces des vraies personnes du livre, dans une deuxième partie qui devient à la fois biographie, documentaire et journal de l’écrivain. Grâce au clocher à la bande blanche visible sur l’une des photos, elle va parvenir à rencontrer ceux qui, un jour, ont décidé de vendre leurs photographies comme on se débarrasse de ses vieux meubles. Les héroïnes de la fiction laissent place à un héros de la réalité, celui d’une France désuète à la recherche du temps perdu. Alors qu’elle pensait faire face à des refus, elle découvre des personnes familières, humbles, qui acceptent de se livrer, à condition de ne pas trop en dévoiler. Coïncidence étrange, la « Laurence » de la fiction se prénomme ainsi dans la vraie vie. L’abandon et la solitude demeurent présents dans les deux parties de l’ouvrage, seules leurs victimes changent.

Trois ans après qu’elle ait reçu cette fameuse enveloppe, l’auteur-compositeur Alex Beaupain, ami d’Isabelle Monnin, décide de donner une voix aux « Gens ». La troisième et dernière partie des « Gens dans l’enveloppe » est un CD de chansons inspirées du roman et de ces personnes (plutôt que « personnages »), qui comporte notamment deux reprises interprétées par les « Gens » eux-mêmes, nous transportant dans les années 1970, époque où ont été prises la plupart des photographies.

Bouleversant et singulier.

Les Gens dans l’enveloppe, livre + CD, écrit par Isabelle Monnin avec Alex Beaupain, aux éditions JC Lattès, 370 pages, 22.00 €.

Written by Claire Faugeroux

"Y" dans l'âme, fermement décidée à prouver que sa génération a construit sa propre culture, nez collé aux écrans... ou pas !