Leka est un robot qui aide les enfants autistes, mais également leur famille et les professionnels de santé. Il fait progresser les enfants en faisant travailler leurs facultés cognitives, psychomotrices et émotionnelles : l’aventure Leka est sur de bons rails. Le robot et la start-up sont l’œuvre d’un Y, Ladislas de Toldi, qui a bien voulu répondre à quelques questions.

Marine Couteau et Ladislas de Toldi les créateurs de Leka © Team Leka

Marine Couteau et Ladislas de Toldi les créateurs de Leka © Team Leka

La Revue Y : Comment est né Leka ?
Ladislas de Toldi :
 À la base, je suis ingénieur en biotechnologies. Avec Marine (Marine Couteau est la co-créatrice de Leka), nous étions dans la même école et nous avons tous les deux des enfants handicapés ou autistes dans notre famille. Pour autant, nous n’avions jamais eu envie de travailler dans ce secteur. Puis un jour, en cours de design, notre professeur – qui est parent d’un enfant atteint d’autisme – nous a proposé un projet. Il s’agissait d’imaginer un produit capable de faciliter l’échange et l’apprentissage des enfants autistes ou handicapés. Nous avons alors récupéré ce projet dans notre cours d’entrepreneuriat. On s’est rendu compte qu’il y avait un fort intérêt pour notre travail et on a décidé de continuer à travailler sur ce projet.

Y : Vous avez toujours eu l’envie d’entreprendre et de créer votre propre start-up ?
L :
Dans la famille nous ne sommes pas des entrepreneurs de père en fils, on n’a pas le sentiment d’être tombés dedans étant petit. Pourtant, après le cours de design, j’ai eu envie de construire quelque chose. J’ai donc commencé à développer un prototype parce que la problématique de l’autisme me plaisait et que j’avais envie d’apporter une solution. Mais la création de Leka comme start-up n’est qu’un moyen pour atteindre ce but, ce n’est pas une fin en soi.

Y : Comment apprend-t-on le métier de CEO (Chief Executif Officier) lorsqu’on est ingénieur de formation ?
L :
Disons que j’avais endossé le maillot de meneur du projet dès le début. Leka est un peu mon bébé depuis que j’ai développé le prototype. Néanmoins, je m’occupe de la recherche d’investisseurs, de représenter Leka pendant les compétitions et de m’occuper de tous ce qui est « pitching » et relations publiques. Marine s’occupe de l’aspect « business development », coordination avec la R&D voire la R&D en elle même. Elle est notre COO (Chief Operating Officier).

Y : Comment avez-vous trouvé l’équilibre entre compétitions de start-up, conférences, recherche de fonds et développement du produit ?
L :
 C’est là qu’est l’avantage d’être deux. Ça nous a permis de nous diviser les tâches et de se répartir le travail selon nos préférences et nos capacités. Je m’occupe des conférences et des compétitions parce que parler devant du monde et expliquer le « en quoi Leka est formidable » me plaît beaucoup. De ce point de vue nous avons eu plutôt une bonne stratégie de marketing et de communication. Les compétitions permettent de gagner en visibilité, de récolter des fonds, des commentaires et des analyses sur notre start-up, etc. Cependant, il faut aussi faire avancer le projet. Les compétitions et conférences sont excellentes pour se lancer, puis au fur et à mesure il faut trouver ce fameux équilibre. Je pense que Leka en est proche.

Leka

Y : Quelle démarche avez-vous adopté pour sonder le potentiel de Leka sur le marché ?
L :
Bien que nous ayons tous deux (avec Marine) des enfants autistes dans notre famille, nous avions peu de contacts. On a donc pris notre courage à deux mains et nous sommes allés toquer à toutes les portes. On a travaillé notre discours, recueilli les commentaires, écouté les conseils et on a progressé petit à petit. Le plus drôle c’est de revoir des personnes surprises de notre succès après nous avoir plus ou moins ri au nez. Nous continuons notre démarche. Marine prend régulièrement des nouvelles des clients, des personnes qui nous conseillent afin de coller à leurs attentes, parfois de rencontrer de nouvelles personnes susceptibles de nous aider. C’est un travail permanent et essentiel pour un produit comme Leka.

Y : Quels ont été les premiers acteurs à soutenir Leka ?
L : 
Principalement les familles concernées et les centres de recherche scientifique. On a reçu le soutien de beaucoup d’associations en lien avec l’autisme et notamment Autisme Ensemble 95. On compte aussi sur la Fégapéi (Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées et fragiles). Mais ce ne sont pas nos uniques soutiens. Lorsqu’on touche à ce genre de problématiques, les soutiens sont d’autant plus nombreux.

Y : Et concernant vos partenaires ?
L :
On s’est heurté à un problème. Nous ne sommes pas issus d’une grande école et Leka n’est pas non plus issu de travaux universitaire. On a donc dû composer avec ce double handicap qui limite le réseau et l’intérêt du monde universitaire. De plus, il n’y a pas de formation au traitement de l’autisme en France, ce qui, à défaut de ne pas fermer des portes, n’en n’ouvre pas non plus. Et c’est ici que le rôle des concours et compétitions de start-up a été essentiel voire vital, en donnant de la légitimité à Leka. Aujourd’hui on a un partenariat avec Scientipôle qui contribue à hauteur de 60 000 euros dans Leka, AG2R la Mondiale nous aide également et nous avons réussi à lever 450 000 euros de fonds grâce à So we fund.

Y : Vous utilisez beaucoup le financement participatif et votre dernière campagne sur Indiego pour le lancement du premier produit a été un succès. Félicitations !
L :
Oui, nous avons lancé une campagne du 3 mai au 3 juin 2016. La campagne fut un succès au vu de l’objectif : on visait 60 000 dollars, on en a récolté 110 000. C’est énorme pour le secteur du handicap et de l’autisme mais nous attendions plus. Sur ces 110 000 dollars, 45 000 proviennent de France et 40 000 proviennent des États-Unis. Le reste vient de Belgique, du Royaume-Uni, etc. Mais la campagne est toujours ouverte et les acheteurs potentiels peuvent donc continuer à soutenir Leka.

Leka

Y : Les Etats-Unis sont votre prochaine étape ?
L : Le marché français pose quelques soucis. Tout d’abord parce qu’il est restreint, mais ce n’est pas le principal obstacle. C’est surtout un marché qui est en retard par rapport à la solution que propose Leka. Les familles voudront d’abord obtenir une place dans un centre spécialisé et ensuite envisager l’utilisation du robot. Les États-Unis en sont à l’étape suivante, les familles vont moins hésiter à utiliser directement le robot. Et comme je l’ai déjà dit, il n’y a pas de formation propre au traitement de l’autisme en France.

Y : Quels sont les événements à venir pour Leka ?
L :
Le programme de la rentrée est encore à définir, on travaille dessus avec toute l’équipe. Le plus gros du boulot maintenant va être la mise sur le marché de notre robot. On va travailler la-dessus dans les prochains mois.

La page web Indiego de la campagne de financement de participatif de Leka ici,
Le site web de Leka ici,

Written by Bastien Cueff